La question du logement sera-t-elle à l’origine de la prochaine grande crise sociale ? Les professionnels de l’immobilier expriment depuis plusieurs années leurs inquiétudes sur les conséquences de la mise en œuvre du DPE énergétique, mais également sur l’arrivée du ZAN (Non-artificialisation des sols). La mise en place du DPE entraîne un effondrement du marché de la location, particulièrement dans les grandes villes, car de nombreux propriétaires préfèrent retirer leur bien du marché. La question du ZAN est un nouveau sujet crucial puisque la volonté du gouvernement est de supprimer le modèle traditionnel de la maison individuelle au nom de la non-artificialisation.
Le ZAN vise à ne plus construire de zones pavillonnaires, mais à densifier
Tout a commencé avec un rapport du GIEC dénonçant le rôle du secteur immobilier dans la lutte contre le dérèglement climatique : « La création de logements est responsable de 70 % de l’artificialisation des sols en France. » Résultat : le ZAN vise à ne plus construire de zones pavillonnaires, mais à densifier. En clair, la maison individuelle, c’est terminé, les élus ont l’obligation de densifier en construisant des immeubles. Les décrets relatifs au ZAN ont été publiés au Journal officiel 28 novembre 2023.
Les parlementaires de l’opposition sont déjà nombreux à alerter de cette situation. Par exemple, Christelle Petex-Levet, députée LR de Haute-Savoie, rappelle que « le développement nécessite de l’espace. On passe de tout à rien, comme pour les autres sujets. D’abord, on est très laxiste, on ne fait pas attention, puis on nous explique qu’il ne faut plus rien consommer. On veut développer l’entreprise en France sans lui donner les moyens d’y parvenir. »
Ce qui est complotiste un jour devient le quotidien du lendemain
Alain Houpert, sénateur LR de la Côte-d’Or, va plus loin : « Ce qui se dessine, c’est une contrainte climatique pour les décideurs politiques. C’est en tous cas la demande de la WWF sur les grands projets. La loi Zéro artificialisation nette est un Pass imposé aux collectivités. Les ZFE sont des passes climatiques imposés aux citoyens. Sur le fond, nous devons agir, mais, là encore, être cohérents. On ne peut pas vendre 250 Airbus aux Indiens et supprimer des lignes en France. Les citoyens européens n’ont pas vocation à servir de cobayes à la politique climatique mondiale. » Le sénateur LR ajoute : « Le problème est que depuis plusieurs années, nous avons pu constater que le pire peut arriver et que ce qui est complotiste un jour devient le quotidien du lendemain. »
Ce modèle de lotissements n’était plus envisageable
Frédéric Falcon, député RN du Gard, annonce que la question des DPE et du ZAN sera au cœur des préoccupations du rassemblement national : « À force de taper sur l’immobilier, de couper dans les dépenses affectées à l’immobilier, notamment dans le logement social aussi, cela crée une crise du logement comme on n’en a pas connue depuis le début des années 90. La propriété privée est attaquée par ces DPE et cela pose maintenant de nombreux problèmes sur le marché locatif. » Le parlementaire dénonce une volonté du gouvernement de s’attaquer à la maison individuelle : « Tous ces gens ont des résidences secondaires, mais ils ne veulent pas que le Français moyen puisse acquérir une maison dans un lotissement. Même le préfet d’Occitanie m’a affirmé lors d’un rendez-vous que ce modèle de lotissements n’était plus envisageable. Je lui ai expliqué que c’était pourtant le rêve d’une grande majorité de Français et que la France n’était pas un pays surpeuplé. Derrière, l’Union européenne influe beaucoup sur la politique du logement d’Emmanuel Macron. Je ne vois pas pourquoi on priverait les Français de l’accès à la propriété privée, d’un pavillon ou d’une maison, au prétexte que des idéologues ont décidé à Bruxelles que ce n’était plus possible et qu’il fallait maintenant se concentrer dans des logements collectifs ! Je ne sais pas où ces gens veulent nous emmener, mais il n’y a rien de bon. Ils ont déjà détruit l’industrie automobile et ils veulent s’attaquer maintenant à l’immobilier en le collectivisant. »
Je dis aujourd’hui à l’État de nous faire confiance
Franck Louvrier, maire de La Baule, a également abordé cette question, lors du Conseil municipal du 15 décembre dernier, en soulignant qu’il était difficile de s’opposer à cela, car « puisque c’est la loi qui vise à définir le contexte de l’application du ZAN ». En clair, « les surfaces artificialisées regroupent par définition l’habitat et les espaces verts associés, les zones industrielles et commerciales, les équipements sportifs ou de loisirs, les réseaux de transport, les parkings ou encore les mines, décharges et chantiers. » Ainsi, « nous sommes face à la quadrature du cercle : comment d’un côté répondre à l’urgence du manque de logements et de l’autre ne pas continuer à développer l’urbanisme sur des terres naturelles ? Évidemment, nous ne pouvons qu’être d’accord avec l’esprit de la loi, mais à condition de fixer un cadre en adéquation avec le territoire. C’est le principe d’une bonne loi : elle fixe un cadre général, contraignant, mais aussi suffisamment souple pour permettre de s’adapter. Vous le savez, localement, nous avons déjà nos PLU, les ScOT, les règles environnementales diverses et variées (loi Littoral et même loi Montagne…) qui sont déjà contraignantes. Le Conseil régional n’a pu obtenir de l’État une mutualisation des objectifs pour tenir compte de la réalité démographique de chaque région, car tous les territoires ne sont pas logés à la même enseigne. Je dis aujourd’hui à l’État de nous faire confiance, de nous laisser des marges de manœuvre. Ici, à La Baule, nous sommes particulièrement bon élève avec le cas de notre ancien camping municipal, dont les 9/10ème, soit 4,8 hectares, vont revenir à la forêt d’Escoublac : c’est bien la preuve que nous savons renaturer. »
Je ne serai pas le maire qui refera l’erreur des années 60
Franck Louvrier conclut : « Je crains qu’une application stricte de la loi ZAN, de la même façon que la loi SRU, provoque davantage d’immobilisme alors que notre pays doit envisager de construire chaque année 450 000 logements. Pour remédier à ce contexte, je ne serai pas le maire qui refera l’erreur des années 60, de construire à nouveau la ville sur la ville avec des immeubles de grande hauteur, car certains commencent à nous redire que si on ne peut pas s’étaler, il va falloir s’élever ».