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Marc Sanchez, secrétaire général du Syndicat des Indépendants : « Il est hors de question d’augmenter les prélèvements obligatoires. »

Le SDI (Syndicat des Indépendants) a réagi aux propos du président du MEDEF se déclarant prêt à discuter d’une hausse d’impôts des entreprises : « Nos professionnels indépendants et dirigeants de TPE n’ont en aucun cas les moyens d’assumer un surcroît de charges sociales ou fiscales. Ils remboursent leur PGE (Prêt Garanti par l’État), peinent à faire face aux 14% d’augmentation du SMIC en deux ans, le tout dans un contexte de baisse de la consommation. Sur les 12 derniers mois, ils n’ont jamais été aussi nombreux à devoir fermer leurs portes depuis les 30 dernières années. Libre aux grandes entreprises de mandater leurs représentants en vue d’augmenter leurs charges. De notre côté, nous entendons travailler sur une rationalisation des dépenses publiques. » Nous évoquons l’actualité des petites entreprises avec Marc Sanchez, secrétaire général du SDI.

Kernews : Vos dernières enquêtes confirment le fait que la trésorerie des commerçants et des petites entreprises n’a jamais été aussi faible et que les inquiétudes sont vives. La formation du nouveau gouvernement, qui ne semble pas avoir un programme confiscatoire, peut-elle redonner un peu d’espoir ?

Marc Sanchez : Effectivement, il y a eu une période de forte inquiétude depuis la dissolution. Beaucoup de nos adhérents ont préféré geler leurs investissements et leurs recrutements car ils ignoraient à quelle sauce ils seraient mangés. En plus, la situation économique est assez compliquée. Au 31 juillet, nous étions à 63 000 défaillances d’entreprises, dont 72 % ont été mises directement en liquidation judiciaire, et 59 % d’entre elles ont moins de trois salariés. Le contexte économique étant compliqué, le fait de ne pas avoir de gouvernement, avec toutes les inquiétudes sur le programme du NFP avec le SMIC à 1600 €, l’indexation de l’inflation sur les salaires ou le blocage des prix, on comprend que, face à tout cela, la nomination de Michel Barnier ait été accueillie favorablement. Cependant, il faut faire preuve de vigilance car, face à l’ampleur de la dette publique, il est fort probable que les prélèvements obligatoires qui pèsent sur nos entreprises et qui représentent déjà 46 % du PIB, puissent à nouveau être augmentés. Il y a eu des éléments rassurants lors de la nomination du Premier ministre mais, malheureusement, les discussions prennent une certaine tournure aujourd’hui. A priori, nos entreprises risquent de ne pas être épargnées par l’augmentation des prélèvements. Dimanche dernier, le Premier ministre a évoqué la possibilité de taxer de manière plus importante les dividendes des dirigeants de SAS. On parle aussi de raboter une partie des aides sur les bas salaires. Bien évidemment, ce sont simplement des pistes à ce stade. Patrice Martin, président du MEDEF, a souligné que les entreprises étaient prêtes à payer plus d’impôts. Donc, cette inquiétude peut devenir une certitude. Il est bien évident que, pour nous, il est hors de question d’augmenter les prélèvements obligatoires qui pèsent sur les entreprises, parce qu’elles ne pourront pas supporter cela. Donc, il y a un aspect rassurant sur le plan institutionnel et politique à travers la nomination de ce gouvernement, mais la vigilance doit rester de mise.

Peut-on imaginer l’instauration d’amendements visant à exclure certaines petites entreprises de ces augmentations d’impôts ?

Le problème, c’est le principe de l’équité en fiscalité. Même si ces amendements sont intégrés, il va falloir une équité devant le paiement de l’impôt et je ne suis pas certain que ces amendements passent la sanction du Conseil constitutionnel. C’est possible, mais ce n’est pas une certitude. On évoque une taxation des grandes entreprises de façon ponctuelle, mais le déficit global de la France est colossal et l’on ne voit pas comment on pourra faire supporter une grande partie de la charge de la dette sur les entreprises. Tout cela ne contribuera pas au développement économique. Les petites entreprises représentent 4 millions de salariés et 6 millions d’actifs, presque 30 % du PIB national et, malheureusement, elles sont hors du spectre des médias et des politiques.

Vous souhaitez donc que le gouvernement s’oriente vers une baisse de la dépense publique…

C’est effectivement le sujet. Nous voudrions bien savoir quelles sont les économies que l’État français et les collectivités locales vont pouvoir faire pour réduire ce déficit. Quand vous avez un pays qui est à 46 % de prélèvements obligatoires, en étant quasiment le champion du monde dans ce domaine, on peut se poser la question de savoir comment tout cet argent est utilisé. N’importe quel chef d’entreprise aurait exactement le même raisonnement dans son entreprise et, en gérant de la sorte, il aurait été viré par ses actionnaires…

Tandis que les petites entreprises investissent moins, on observe que les grands groupes continuent de conquérir des parts de marché. Peut-on craindre un monde futuriste où une cinquantaine de marques, celles qui font de la publicité partout, auront pris possession du marché de 70 millions de Français ?

On peut avoir cette analyse, mais je ne serai pas aussi pessimiste dans cette vision futuriste. Il y a des secteurs qui peuvent tirer leur épingle du jeu en jouant sur la proximité et le conseil. Effectivement, cela nécessite des investissements, avec notamment le digital et une forte capacité d’adaptation aux besoins des consommateurs. Pour cela, il faut des moyens. Dans le contexte que nous vivons actuellement, et dont on n’est pas sorti, on constate que nos adhérents ont besoin d’avoir de la perspective et de la confiance. Dans tous les baromètres que nous avons publiés depuis le début de l’année, on observe que l’indice de confiance est négatif à plus de 90 %. En tant qu’entrepreneur, vous avez besoin de vous projeter sur plusieurs mois. Dans ce contexte, les investissements sont remis à plus tard. Les entrepreneurs demandent une stabilité économique et fiscale, parce que c’est essentiel pour permettre aux entreprises de se relancer. D’ailleurs, c’est beaucoup plus compliqué pour une petite entreprise, évidemment pour des raisons de trésorerie.

Quels conseils donnez-vous à la plupart de vos adhérents ? Faire l’autruche ?

Oui, beaucoup d’entreprises font l’autruche depuis un certain nombre de mois, voire d’années, parce que nous n’avons pas été épargnés, que ce soit avec la crise sanitaire, la guerre en Ukraine, la crise des matières premières, l’inflation et la baisse de la consommation. Effectivement, on peut serrer les boulons le plus possible, pour passer la période difficile, mais on a aussi besoin d’avoir une politique économique et sociale stable. Les entrepreneurs attendent cela de la part du gouvernement.

Longtemps, il y a eu le rêve de devenir entrepreneur, pour la liberté et le bonheur que cela apporte. Toutefois, lorsque l’on discute avec les entrepreneurs, on entend souvent le discours inverse, sur le fait d’être prisonnier, de ne pas avoir de temps et d’être confronté à des problèmes qui viennent de tous les côtés. N’est-ce pas ce que vous observez ?

C’est vrai, la création d’entreprise, je ne parle pas de la microentreprise, reste assez dynamique dans notre pays. Nous sommes un pays d’entrepreneurs. Effectivement, la difficulté, c’est le cap de la deuxième ou de la troisième année, car il y a une série d’embûches, notamment sur le plan structurel, économique, social ou factuel. Il faut garder cette flamme. Aujourd’hui, tout cela est aggravé par une crise politique et institutionnelle, mais on espère que les choses vont se calmer et que l’on va pouvoir entrer dans un contexte beaucoup plus serein.

Écrit par Rédaction

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