À l’âge de 91 ans, un Baulois publie un ouvrage sans concessions sur la situation de la France
Paul Arbaud a 91 ans. En écrivant cet ouvrage, il pensait qu’il s’agirait d’une œuvre posthume. Bonne nouvelle, la Providence lui a donné tort et il a pu répondre à nos questions. Paul Arbaud est scientifique. Ingénieur chimiste, il a publié de nombreuses études, mais également des ouvrages d’analyses politiques. Dans son dernier livre, il fustige ce monde qu’il juge moralement, socialement et humainement décevant. Paul Arbaud habite à La Baule et sa fille est professeur au Lycée Grand Air.
« L’hiver sera rude » de Paul Arbaud est publié aux Éditions du Panthéon
Kernews : On nous annonce depuis longtemps que l’hiver sera rude. Mais à travers cette métaphore, vous expliquez que la France va sans doute connaître une longue période hivernale, en l’occurrence de déliquescence. Vous aviez déjà écrit cela il y a plusieurs années, or cela se produit…
Paul Arbaud : Je suis d’autant plus triste pour notre pays que cela s’est produit sournoisement, progressivement, et je m’en suis aperçu au fur et à mesure, en constatant ce déni de réalité, ce refus de reconnaître ce qui se passait. Au cours de votre vie professionnelle, lorsqu’elle progresse, vous touchez de plus en plus de domaines et, à chaque fois, on peut constater un nouveau problème à travers cette sorte de manège présidentiel où chacun prend des décisions sans en considérer les conséquences. Tout cela est dangereux et nuisible pour notre pays.
Comment expliquez-vous qu’un pays puisse se sacrifier de cette manière ?
Je m’aperçois que des gens qui n’ont pas du tout notre mentalité, comme les Américains, arrivent à une conclusion qui est presque mathématique. Il est rigoureusement et mathématiquement impossible d’avoir un mouvement uniformément accéléré avec des variables qui ont des composantes multiples. Un cancer, c’est une prolifération anormale des cellules et c’est la même chose avec ce qui se passe en ce moment. On développe une nouvelle civilisation supposée, mais je ne suis pas certain qu’il en sortira une nouvelle civilisation. On observe une décomposition préalable à la mort de toute la société.
Sommes-nous en train de vivre une sorte de loi de Moore inversée dans la dégradation ?
C’est le problème des mouvements uniformément accélérés. La vitesse devient telle qu’à la fin vous devez arriver à la catastrophe. Cela se produit tout seul. Mon analyse politique porte sur les cinq derniers présidents. Chacun porte une très lourde responsabilité. Je commence avec François Mitterrand et cela va donc de M à M…
Cette évolution vous inquiète-t-elle pour vos enfants ?
Non, pas pour mes enfants, ils sont sortis d’affaire. Mais je suis très inquiet pour les générations futures et surtout pour mes arrière-petits-enfants. C’est l’épreuve de la Bible qui me revient tout le temps : au commencement était la fin et la fin est le commencement. Avec leur manège présidentiel, on nous le présente d’une manière différente. On essaye de convaincre les gens d’accepter de subir, comme si c’était impossible à maîtriser, alors qu’il y a beaucoup de choses qui auraient pu être maîtrisées dès l’origine. Scientifiquement, peu importent les données, si l’on prend les choses à temps, au bon moment, en faisant ce qui doit être fait, on arrive à faire des prédictions qui sont vraiment des prophéties. D’ailleurs, j’ai pu prédire qu’un inconnu, en l’occurrence Emmanuel Macron, se présenterait comme président de la République et qu’il s’introniserait lui-même. J’avais prévenu qu’il y avait derrière un certain côté Bonaparte qui nous emmènerait un peu trop loin, en nous éloignant de notre France traditionnelle.
Vous faites ce parallèle entre la situation française et celle d’un corps en décomposition, tandis que d’autres estiment que la France est éternelle et qu’elle se redressera toujours. Quels éléments vous amènent à penser, en tant que scientifique, que cette fois-ci le contexte est différent ?
Ce qui est totalement différent, c’est la baisse de la moyenne intellectuelle et de la culture générale. À partir du moment où, pour satisfaire un certain nombre de gens, vous faites rentrer de plus en plus de gens qui n’ont pas la même culture, la même formation ou la même mentalité, automatiquement, le niveau baisse. Comme on choisit toujours les gens en fonction d’un nombre d’électeurs, le choix se fait dans un milieu qui est de plus en plus bas et dont le quotient intellectuel ne va qu’en baissant. Il suffit de voir ce qui se passe au niveau des écoles ou des hôpitaux. Quand un système est en équilibre, si vous ajoutez un petit quelque chose supplémentaire, il se produit dans le système une modification telle qu’il tend à rétablir l’équilibre pour maintenir cet équilibre. Mais, dès que vous dépassez une dose, vous ne pouvez plus rien absorber. C’est pour cette raison qu’il y a des générations complètes de prétendus Français qui ne savent même pas ce que c’est que d’être Français ! Ils sont Français tout simplement parce qu’on leur a dit qu’ils étaient Français. Ils n’ont pas compris qu’ils faisaient partie d’un groupe à l’intérieur d’une Nation. Maintenant, on introduit dans la classe politique de nouveaux experts qui sont censés remplacer les anciens experts. Or, ce ne sont que des gens qui manient l’esbroufe, avec beaucoup de beaux parleurs, dont peu sont de bons faiseurs.
Vous évoquez la question de l’immigration, mais on pourrait aussi parler de la distribution du baccalauréat et de la sélection à l’université.…
On revient à cette question de la baisse générale du niveau moyen. Vous donnez cette possibilité aux gens, au titre de l’égalité arithmétique – alors que cela n’a rien à voir avec l’équité – d’avoir le bac. Mais ce n’est pas parce que nous sommes nombreux à avoir tort, que ceux qui ont tort ont raison. C’est la phrase clé. Il y a plein de gens qui s’imaginent qu’ils sont plus capables que d’autres, alors qu’ils sont à un niveau intellectuel nettement plus bas que ceux qu’ils veulent remplacer. Tant que l’on raisonnera dans un monde où certains chiffres sont exponentiels, tandis que d’autres ne le sont pas, vous ne pourrez jamais trouver la véritable solution. À la fin, c’est la dilatation. Tant que la population mondiale continuera de croître à cette vitesse, on consommera tous les biens de la planète et il ne restera plus rien. Ce n’est pas seulement l’écologie qui est concernée. C’est vraiment l’avenir de la Terre.