Le chanteur sera en concert à La Baule le 13 octobre.
Enrico Macias est toujours en forme. Le chanteur vit pour sa musique et son public. Ainsi, à l’âge de 85 ans, il est en tournée dans toute la France, mais également au Canada et aux États-Unis. Il sera en concert le dimanche 13 octobre à 16h au Palais des Congrès Atlantia Jacques Chirac de La Baule pour son spectacle « La fête continue ! » Il répond aux questions de Yannick Urrien.
Kernews : Vous faites salle pleine dans toute la France. D’abord, on sait que vous avez subi des soucis de santé il y a quelques mois. Alors, comment allez-vous ?
Enrico Macias : Pour un homme qui a presque 86 ans, la santé c’est déjà pas mal, avec des hauts et des bas. Mais, pour le moment, je vais très bien. La tournée a pu reprendre.
Qu’allez-vous proposer dans votre spectacle ? Allons-nous retrouver les tubes que l’on connaît, ou allez-vous aussi en mélanger avec du malouf, à savoir la musique traditionnelle andalouse ?
Il y aura toutes mes racines musicales, le malouf, mais aussi les chansons que tout le monde connaît, et même celles que l’on ne connaît pas.
Vous êtes un précurseur, car lorsque vous avez commencé, vous avez su occidentaliser des mélodies de malouf, en les condensant sur des formats de trois à quatre minutes pour que cela puisse tenir sur un 45 tours…
Ce n’était pas des mélodies de malouf, mais des mélodies inspirées par le malouf, ce n’est pas la même chose. Oui, j’ai introduit l’Orient dans l’Occident et l’Occident dans l’Orient.
Beaucoup de musiciens juifs ont fait cela dans le monde arabe. Ont-ils apporté cette dose d’Occident à la musique arabe ?
C’est une culture judéo-musulmane, mais aussi chrétienne, puisqu’il y a eu des musiciens chrétiens qui ont fait du malouf.
Qu’est-ce que le malouf ? Certaines mélodies peuvent-elles se rapprocher de la musique arabe traditionnelle ?
Non, rien à voir avec cette musique, puisque le malouf est une musique berbère, d’origine andalouse et, quand on dit arabo-andalouse, ce n’est pas très juste : c’est plutôt berbéro-judéo-andalouse.
En sens inverse, des artistes arabes ont repris cette musique, comme parfois Oum Khaltoum…
Oui, c’est vrai, mais également des compositeurs de toutes religions qui ont repris cette musique depuis des millénaires.
Ce sont parfois des morceaux qui durent plusieurs dizaines de minutes…
Oui, parce que ce sont des épopées. Ce sont des musiques qui racontent l’histoire, collective et personnelle… Donc, cela dure longtemps.
On s’aperçoit que les musiques centenaires, comme le malouf, traversent les générations, tandis que des musiques plus récentes, comme le raï, évoluent en fonction des modes…
Je considère que le raï est une émanation de la musique arabe andalouse, mais ce n’est pas une culture historique. Personnellement, j’aime beaucoup le raï, parce que c’est une musique très populaire. Mais, évidemment, cela n’a rien à voir avec la musique classique comme le malouf ou le chaabi.
Le malouf a de grandes étendues géographiques, mais on considère que Constantine est le berceau du malouf…
Oui, Constantine est la capitale du malouf, comme Alger est la capitale du chaabi. Nous avons une influence qui part de Séville, en Andalousie, alors que c’est l’influence de Grenade qui a porté sur le malouf au Maroc. Finalement, c’est la même musique. Il ne faut pas oublier que les Berbères étaient sur tout le Maghreb. Quand je parle de la musique berbéro-judéo-arabe et andalouse, je ne me trompe pas.
Vous allez chanter de grands succès comme « J’ai quitté mon pays ». Or, sur le plan historique, vous ne l’avez pas vraiment quitté puisque l’Algérie était un département français…
Oui, mais je chante la France de mon enfance. L’Algérie c’était la France, mon enfance c’est l’Algérie…
Vous remplissez les salles, y compris dans des régions comme la nôtre, où la communauté pied-noir est quasiment inexistante…
Au début de ma carrière, le fonds de mon public, c’étaient d’abord les pieds-noirs, les harkis et les juifs. Après, je suis devenu un chanteur populaire en France et j’ai ensuite tourné dans le monde entier. Maintenant, je vais au bout du monde. Je vais au Canada, aux États-Unis, un peu partout dans le monde. Vous savez, la musique est un langage universel et l’on arrive à partager ce langage dans des contrées lointaines. Cette musique est enfouie dans l’être humain et la culture se développe un peu partout. Quand on chante cela, les gens se remémorent ce qu’ils ont dans leur subconscient.
Que va-t-il rester de la culture pied-noir ?
Heureusement que nous avons enregistré des disques et qu’il y a eu des écrivains qui ont laissé une certaine littérature qui rappelle notre identité et notre histoire ! Notre histoire s’est déplacée, mais elle existe. Dans mon public, j’ai énormément de jeunes. Les nouvelles générations veulent comprendre pourquoi leurs parents ont aimé telle ou telle chanson et ils sont curieux de savoir qui je suis.
Il y a des chansons comme « Les gens du Nord » qui traversent les décennies…
Vous voyez que dans mon répertoire il y a aussi des chansons purement françaises…
Dans certaines villes, il y a eu des pétitions contre votre venue, à la suite de vos prises de position sur le conflit entre Israël et la Palestine. Comment jugez-vous cela ?
Je ne voudrais pas trop m’étendre sur ce sujet. Je voudrais simplement vous dire que j’ai été boycotté, mais j’ai bien traversé cette épreuve. Je ne cautionne pas ce type de boycott, dans la mesure où je n’ai jamais abandonné le public et la scène. Même si l’on a essayé de m’empêcher de chanter, j’ai toujours voulu chanter.
On vous présente souvent comme un musicien et un chanteur. Vous êtes aussi comédien et l’on regrette de ne pas vous avoir beaucoup vu au cinéma…
Je m’y suis pris un peu tard. Je n’ai jamais rien demandé à personne, c’est le cinéma qui est venu à moi. J’adore, c’est une récréation, je m’amuse…
Enfin, connaissez-vous La Baule ?
Je suis déjà venu à La Baule, c’est une région formidable, c’est très beau. Franchement, je ne dis pas cela pour vous faire plaisir, c’est la vérité !